Interview / Alliance Marine : " 2024 est une année intéressante pour reposer les fondamentaux stratégiques"

Jérémy Tedguy, PDG du groupe Alliance Marine, revient avec BoatIndustry sur les enjeux de la situation macro-économique pour le spécialiste de l'équipement de plaisance et de marine professionnelle, sur son positionnement et les défis à venir pour le groupe.

Arrivé à la tête du groupe Alliance Marine à l'été 2023, Jérémy Tedguy, répond aux questions de BoatIndustry sur son analyse de la situation économique de la filière plaisance et les grands axes de la politique qu'il entend mener à la barre du spécialiste de la distribution et de l'équipement pour la marine professionnelle et de loisir.

Comment voyez-vous la situation de l'industrie nautique pour 2024 ?

On a connu en 2023 une année de consolidation en volume après 2 années euphoriques. Au sein du groupe Alliance Marine, la plaisance a connu une stabilisation, voire une légère baisse, tandis que la marine professionnelle a été en croissance, avec en sous-jacent le marché militaire, ce qui devrait nous amener à présenter un chiffre d'affaires 2023 en hausse.

Les pays du nord ont plus souffert que les pays du sud. Il est difficile d'en analyser les causes, mais le sud ayant connu une croissance plus régulière en 2020-21 que le nord avec un fort bond, la redescente est moins forte. De plus, le conflit en Ukraine a plus vite marqué es esprits en Allemagne ou en Suède qu'en France ou en Italie.

Si l'on reprend la situation. En 2021, on a connu une saturation de la supply chain mondiale. En 2022 une inflation à des taux élevés, et en 2023, une hausse des taux d'intérêt, pas moins de 10 fois en 14 mois. A ce climat macroéconomique compliqué se rajoute la guerre en Israël, dont il est difficile d'anticiper les conséquences. 2024 est donc sous le signe de l'incertitude, mais notre industrie a toujours su montrer sa résilience. Nous restons donc d'un optimisme prudent. Après une année d'aftermarket plutôt faible, on peut espérer un rebond auquel on ne s'attend pas nécessairement.

A quelle stratégie de la part du groupe doit-on s'attendre sur cette période ?

2024 sera une année de gestion. Il n'y a pas de projet de croissance externe en cours. C'est un moment intéressant pour reposer les fondamentaux de notre stratégie. Nous avons la volonté de devenir leaders en Europe dans la distribution BtoB dans la plaisance et la marine professionnelle. Cela passe par un développement dans les pays où nous ne sommes pas assez représentés. La démarche de structuration transversale du groupe, notamment au niveau export et marketing  va dans ce sens, accompagnée par un gros projet informatique avec une harmonisation qui permettra plus d'interaction entre les filiales.

Le développement se fera avant tout en BtoB. Il n'y a pas de volonté d'accélérer le développement en BtoC à l'international en croissance externe. Le rachat de 12Seemeilen  était avant tout guidé par la volonté d'apprendre plus vite dans la vente en ligne BtoC, ce qui a été vertueux pour le développement d'AD Nautic en ligne.

Nous souhaitons garder une quote-part de 20 à 25% de produits propriétaires. Nous avons quelques marques fortes et produits qui nécessitent que nous les fabriquions dans des domaines comme la sécurité. Pour le reste, nous devons rationaliser le portefeuille de marques, afin de simplifier les références pour l'ensemble de nos filiales sous une seule marque.

Le niveau de stock est un argument de certains acteurs de la distribution. Comment estimez-vous le vôtre ?

Nous pensons que nous avons l'un des plus gros niveaux de stock du secteur, et l'un des plus gros que l'on ait eu, à un niveau normatif de 100 M€. Avoir plus de stock n'apporterait pas beaucoup à nos clients, ce qui compte est la qualité de stock, et l'amélioration de sa rotation.

Comment Alliance Marine envisage-t-il ses réponses et celles de la distribution d'équipement face à la crise environnementale ?

Notre industrie doit entrer dans une révolution dans les 10-15 ans, sinon elle risque de ne plus être acceptée par les consommateurs. Aujourd'hui 75-80 % des bateaux sont à moteur. Il faut une révolution sur la propulsion, le traitement de la coque des bateaux. En tant que distributeur, nous avons une part à jouer, dans l'énergie et le transport amont et aval. Nous avons déjà posé des panneaux solaires chez VDM Reya et Intermer. On travaille sur les emballages, comme chez Plastimo, en supprimant progressivement des emballages plastiques au profit de contenants plus recyclables. Les entreprises interviennent aussi plus localement comme Bukh Bremen pour un navire océanographique. Nous réalisons cette année notre 1er bilan carbone. De ce bilan découlera un ensemble d'actions à mettre en place, notamment sur la composition des équipements, le fait de trouver des fournisseurs plus proches. C'est une démarche que l'on initie.

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