Réunir les acteurs de la course au large autour de la transition
Organisé à Lorient à l'occasion du Défi Azimut, dernière course de préparation des skippers avant le Vendée Globe, le forum Course au large et développement soutenable, témoigne d'un intérêt grandissant pour les problématiques environnementales dans le milieu de la voile de compétition. Un panel de 7 intervenants est venu y partager ses expériences. Christophe Baley, chercheur à l'Université de Bretagne Sud, spécialiste des bio-composites, rappelait en introduction la difficulté de changer de regard sur les objets. Le Class America exposé devant la Cité de la Voile Eric Tabarly est-il un magnifique bateau ou un déchet plastique ? Pour réfléchir au changements nécessaires et urgents, il soulignait la nécessité pour changer de paradigme d'en proposer un nouveau. L'heure est donc à créer des "collectifs de pensée", concluait-il.
Dans ce contexte, le mouvement La Vague, représenté par Sébastien Guého, ingénieur chez Gsea Design, apporte sa pierre à l'édifice. Né en février 2020, il revendique environ 150 personnes. Il a mené 14 ateliers autour de la raison d'être de la voile de compétition, de l'analyse de cycle de vie des bateaux et des enjeux sociétaux et de communication du secteur. Une association devrait voir le jour, avec un mode de gouvernance défini pour représenter l'ensemble des acteurs de la filière. "Il y a un travail à mener pour l'implication des skippers car ce sont les ambassadeurs des projets auprès des publics et des sponsors et ils votent les règles de classe" souligne Sébastien Guého.

Eco-conception et analyse de cycle de vie des bateaux
Faire des bateaux plus écologiques est le 1er moyen pour la course au large de faire mieux coïncider son image "verte" avec la réalité de bateaux high-tech à l'impact environnemental non négligeable. L'association IMOCA, en charge de la classe des voiliers du Vendée Globe, rappelle travailler sur plusieurs axes dans la dernière version de la jauge, dont l'utilisation de matériaux alternatifs pour le pièces non structurelles, ainsi que l'analyse de cycle de vie. "Nous testons le logiciel MarineShift360 avec les chantiers CDK et Multiplast. Notre objectif est de connaître le bilan carbone d'un IMOCA en 2021" indique Imogen Dinham-Price. Certains membres de l'assistance regrettent néanmoins l'absence d'information sur les bases de données du logiciel et la limitation au bilan carbone. Les démarches d'éco-conception font partie des demandes d'accompagnement fort de la part des sociétés soulignent les résultats d'un sondage présenté par Carole Bourlon de Bretagne Développement Innovation.

Mutualisation et ré-utilisation du matériel
Pour diminuer son impact, la filière course au large travaille également sur son fonctionnement quotidien. Régis Guyon, de l'agence de développement lorientaise Audélor, rappelle quelques axes de travail en cours ou à venir, comme la mutualisation de matériel ou de semi-rigides, le développement de courses retour pour éviter les transferts par cargo. L'initiative de la Give-Box mise en place à Lorient permet aux teams de course au large de proposer à des équipes à plus faible budget de ré-utiliser du matériel dont ils se séparent. Une réflexion autour de la sobriété numérique, en limitant les vidéos transmises, est évoquée.
Nécessaire accélération
L'innovation est en général chaotique et non linéaire, expliquait lors du forum Emmanuel Poisson de la fondation Explore, elle naît de l'association de visionnaires et d'esprits pratiques. Si les ingrédients semblent présents, il faudra réussir à lever les freins d'une industrie bien installée que son poids économique (58 M€ en 2020 rien qu'en frais de fonctionnement) peut rendre frileuse aux changements brutaux.