Jérémy Revel est bien placé pour le dire : "Ici, quand on fait du hors gel, c'est vraiment du hors gel ! Il faut être carré sur l'hivernage et bien protéger les blocs moteurs. La bonne contrepartie, c'est la faible usure des carènes de bateau du fait de l'absence de sel." Gérant du chantier naval du Chablais, qui compte cinq personnes dont un apprenti, pour près de 150 bateaux en clientèle, Jérémy Revel a créé l'entreprise savoyarde avec un associé fin 2012 dans un hangar de 1 200 m². Aujourd'hui seul à la barre, il occupe toujours les mêmes locaux, situés au bord de la Dranse, en prise avec le Léman. Réputation bien établie, il reste spécialisé dans les bateaux à moteur : "J'ai été élevé dans la famille d'un électricien auto, les outils à la main. La voile c'est pour moi un autre métier."

Beaucoup de bateaux à moteur mais pas de motomarines
CNC assure l'entretien, le stockage et hivernage de près de 150 bateaux, dont 90 sous couvert. Jérémy Revel précise : "Ils font maximum 8 mètres de long et je n'ai quasiment aucun diesel." Sur le Léman, les bateaux à moteur côtoient aisément les voiliers à ceci près que les motomarines sont interdites, la préfecture n'en voulant pas. L'une des autres spécificités du lac a trait à sa course emblématique, Le Bol d'Or Mirabaud, la plus importante régate du monde en bassin fermé. Cette vitrine de la voile suisse consiste à faire l'aller retour du lac dans le sens de la longueur Genève-Bouveret-Genève. A cette occasion, les bateaux à moteurs sont aussi de sortie en nombre.

Marinas non grata
Mais une autre spécificité, moins réjouissante, caractérise aussi les rives du Léman : le niveau "délirant" des prix du foncier. Un enjeu d'autant plus complexe à appréhender pour le chantier que les places de bateau sont rares et chères. Jérémy Revel et son équipe manutentionnent avec un pont roulant : "Pas la place pour circuler avec un chariot élévateur. Et on stocke sur parfois trois étages." Le chantier entend poursuivre dans la voie de la verticalisation : il vient d'obtenir un permis de construire pour refaire le bâtiment et passer de 90 à 140 bateaux avec, à terme, un atelier chauffé.
Les places de bateau sont d'autant plus prisées que les ports existants ne bénéficient pas d'extension. Jérémy Revel observe : "Il n'est pas rare que pour obtenir une place, les amateurs de plaisance achètent des vieux clous pour changer ensuite de bateau." Sur les rives du Léman, les marinas sont toujours non grata.

