Interview / "Les marques doivent continuer à parler au plaisancier"

L'ancienne responsable marketing de Plastimo partage sa vision de l'évolution de son métier dans la plaisance

Nous avons interrogé Cathy Millien, longtemps responsable du marketing et de la communication de Plastimo, sur l'évolution de son métier et le rôle des différents acteurs du nautisme dans leur relation au plaisancier.

A la tête de la communication et du marketing de Plastimo de 1985 à son départ cette année, en 2021, Cathy Millien nous partage sa vision des changements de son métier au sein de la filière nautique.

Quel est pour toi le rôle du marketing et de la communication dans le nautisme ?

La fonction de la communication est de mettre en scène les événements et les produits de l'entreprise. Et avec l'entreprise, c'est la marque qu'on met en avant, avec ses valeurs et son identité. Le nautisme est un milieu très sympa et les différentes pratiques sur l'eau nous offrent beaucoup de matière, mais il y a des limites au storytelling : il faut quand même de la matière de qualité et des choses à raconter. La collaboration avec le monde de la course ajoute de l'humain d'abord à notre travail, et aussi aux messages de la marque : un coureur ou un team qui nous sont fidèles apportent de l'émotion et du piment, on vibre ou on tremble pour eux. Enfin, d'un point de vue opérationnel, une équipe comm' a la chance de faire des choses qui se voient, c'est assez gratifiant et rarement répétitif.

Plastimo travaille depuis longtemps avec les skippers de course au large
Plastimo travaille depuis longtemps avec les skippers de course au large

Quelles évolutions as-tu pu constater au cours de ta carrière ?

Il y a toujours eu des évolutions, à commencer par les outils qui aident à faire un catalogue ! Mais aucun logiciel ne fait un catalogue ni une newsletter : il faut un minimum de capacité rédactionnelle et un réel intérêt pour le sujet. Nous nous adressons à des passionnés : notre discours doit les "accrocher". Le gros tournant pour moi a été il y a 12-15 ans : il a fallu réellement se remettre en cause avec l'arrivée du digital et des réseaux sociaux. Pour moi, c'était soit me priver de ces outils incontournables et potentiellement m'ennuyer jusqu'à la fin de ma carrière, soit m'adapter… et j'avoue que j'y ai vraiment pris goût ! Aujourd'hui, le plaisancier est de plus en plus éduqué grâce aux blogs, publications et sites spécialisés. Et en l'absence de lien physique avec le consommateur due au Covid, il a fallu repenser la communication vers le client final, notamment avec les moyens digitaux émanant à la fois de la marque elle-même et du réseau de shipchandlers.

Le catalogue Plastimo reste un incontournable du nautisme
Le catalogue Plastimo reste un incontournable du nautisme

Quel est le rôle du catalogue, celui de Plastimo, ayant longtemps été une référence avec un gros tirage ?

Le catalogue est effectivement le pilier historique de la communication Plastimo… depuis 48 ans ! S'il est vrai que son tirage papier a été réduit au fil des ans, il demeure très consulté et téléchargé en ligne. Avec le développement des centrales, ce sont désormais elles qui font les plus gros tirages. C'est dans le sens de l'histoire. Mais comme Séphora a besoin de Lancôme ou Darty a besoin de Samsung, elles ont besoin des équipementiers. Les clients vont dans les magasins ou sur les sites pour avoir les infos dans les catalogues sur les prix ou les promotions. Notre position est différente, car nous ne vendons pas directement au plaisancier. Aujourd'hui, les centrales sont incontournables : elles structurent et dynamisent leur réseau et leur apportent des outils marketing, elles parlent au plaisancier en lui proposant des animations, des offres spéciales, des clubs d'utilisateurs… Le marché a aussi besoin des shipchandlers indépendants qui créent une dynamique différente. Les allemands étaient très en avance avec le développement de la vente par correspondance, avant internet. Pour autant, je reste convaincue que les marques doivent continuer de parler directement au plaisancier. Alors qu'un réseau franchisé cible surtout un discours commercial, une marque "raconte" le produit : sa genèse et ses innovations, sa légitimité par rapport aux valeurs de la marque, sa contribution au capital confiance ressenti par le plaisancier… la marque fait plus rêver que l'enseigne de distribution, mais les deux fonctionnent main dans la main et ont absolument besoin l'une de l'autre.

En résumé, le consommateur plaisancier fonctionne pour ses achats de bateau et d'équipements, comme dans le reste de sa vie. S'il est vrai que le métier et les magasins de shipchandlers n'ont pas été les tout premiers à s'adapter aux nouveaux comportements des consommateurs, cette période est révolue : le réseau a énormément gagné en dynamisme et en modernité au cours des 15 dernières années, réalisant aussi que chaque client peut être multiple à différents moments (régate, croisière familiale, kayak ou SUP… )

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