Plastimo fait partie des acteurs indissociables de la plaisance en France depuis de nombreuses années. Membre clef de l'entreprise depuis 41 ans, Cathy Millien a bien voulu revenir avec nous sur l'histoire de l'entreprise, alors qu'elle l'a quittée au printemps 2021.
Peux-tu nous présenter les grands jalons de l'histoire de Plastimo telle que tu l'as vécue ?
Plastimo a été créé en 1963 par Antoine Zuliani. L'entreprise fabriquait des objets en plastiques et polymères, assez innovants à l'époque. Il y avait surtout les pare-battages et les gilets au départ.
J'ai été embauchée par le fondateur en fin d'année 1979, comme assistante de direction. Il avait vendu au groupe américain Johnson Worldwide Associates (JWA), division loisir du groupe connu notamment pour les cires Johnson. JWA avait aussi ScubaPro, des canoës et des moulinets de pêche. J'avais une formation de linguiste et maîtrisais l'anglais. Antoine Zuliani souhaitait communiquer de manière plus fluide avec son actionnaire...
1979 est un jalon important pour une autre raison, le lancement du 1er radeau de survie avec comme innovation la double chambre. S'ouvre la période américaine, de 1979 à 1997, avec l'arrivée en 1984 d'un patron américain. A partir de 1985, il a mis en place tout le process marketing, avec des équipes structurées, un chef de produit par gamme, l'idée du travail de la marque, la notion de ROI (NDLR : retour sur investissement) pour les nouveaux projets... Ce sont des habitudes importantes, que l'on a su garder. C'est à ce moment que je suis devenue officiellement responsable de la communication. Avant, nous avions une communication opportuniste, avec un patron intuitif doté d'une bonne connaissance du marché. Au même moment, il y a eu une structuration du bureau d'études et des méthodes. A l'époque, tous les produits plastiques étaient fabriqués à Lorient. C'est aussi la période où Plastimo a racheté ses distributeurs à l'international, en Espagne, en Suède, en Italie, aux Pays-Bas... C'était un vrai plaisir avec ma formation de linguiste, car c'était réellement une ambiance pluri-culturelle. Déjà à cette époque, Plastimo était à la fois fabricant et distributeur, même si la communication visible était axée sur les radeaux et les gilets de sauvetage. Nous étions les premiers à commercialiser en France les DECCA, puis les 1ers GPS portable.
Dans les années 1990, Plastimo a fabriqué le 1er gilet gonflable. On avait déjà la faculté de travailler en mode start-up, même si le mot n'était pas à la mode. Il y avait cette culture américaine de créer une task-force, de développer un projet et l'accompagner jusqu'à son lancement. Il fallait y croire, car les gilets gonflables n'étaient pas homologués en France. Les ventes au début se faisaient surtout à l'export, où il n'y a pas d'obligation d'être homologué et où les plaisanciers achètent ce en quoi ils croient. Ca n'est que lorsque les gilets gonflables ont été homologués en France que nous avons pu atteindre des volumes à échelle industrielle et là, Plastimo était prêt avant tout le monde, pionnier avec un produit déjà éprouvé.
De 1992 à 1995, il y a eu une grosse croissance à l'export. Puis en 1997, c'est la 1ère LBO avec la vente à 3I, puis en 1999 achat par Bridgepoint Capital. Commence une grosse période de rachat avec notamment Amiot, Nuova Rade (NDLR : aujourd'hui propriété de Lalizas), DNS, Accastillage Bernard, XM Yachting, Goiot et MaxPower. C'était une période exaltante et passionante à accompagner. On a grossi vite. En même temps, on a emménagé dans le bloc K2 sur la base des sous-marins. On a ainsi eu l'espace pour toutes ces marques. C'est aussi le moment où on a créé la marque corporate Navimo.
Puis en 2004, on a été repris par Duke Street. On a racheté Lofrans. C'était de belles années, avec le lancement de beaucoup de nouveaux produits, mais un gros endettement. En 2008, on ouvre l'usine de Roumaine pour les radeaux de survie, car nous étions très attaqués par les radeaux asiatiques. En 2010, les marques Goiot, NuovaRade, Lofrans et MaxPower, très orientée 1ère monte ont beaucoup souffert de la crise. Plastimo est la marque du groupe qui s'en sortait le mieux, parce que s'adressant surtout à la cible after-market et shipchandlers. C'est aussi le moment où la logistique à été déménagée à Lyon. Le groupe était dans une posture très délicate jusqu'au rachat par le groupe Alliance Marine en 2012. Nous avons été soulagés de voir que la marque Plastimo avait conservé un énorme capital sympathie auprès des plaisanciers, malgré les tourments traversés par Navimo. Au final, en ce qui me concerne, ce ne sont que 18 mois de mauvais souvenir en 41 ans !
Depuis 2012, Plastimo a été accompagné dans son fonctionnement et sa croissance par le Groupe Alliance Marine, avec des investissements chaque année, le rapatriement de la logistique vers Lorient, le rachat de Topoplastic, les nouveaux bâtiments... A l'époque, nous étions le premier fabricant dont Alliance Marine faisait l'acquisition, jusque-là orienté exclusivement vers la distribution. Quelques années plus tard, nous nous sommes réjouis de l'arrivée dans le groupe de marques comme Ocean Safety et Typhoon avec qui nous partageons une identité de concepteur fabricant, spécialisé dans la sécurité. C'est sans doute aussi qu'ayant suivi Plastimo pendant quelques années, Alliance Marine a identifié l'intérêt d'avoir des marques fortes et des produits propriétaires, même si la vaste majorité du groupe opère plutôt dans la distribution. Plastimo se trouve donc parfaitement à sa place dans le groupe, avec cette double identité de fabricant et distributeur.
Quelles sont les périodes qui t'ont le plus plu, ou dont tu es la plus fière ?
Du point de vue de l'évolution professionnelle, j'ai adoré l'époque américaine, avec la création d'une démarche marketing dans cette maison. Aujourd'hui c'est normal, mais à l'époque, nous étions en avance par rapport à la profession du Nautisme. Nous sommes passés d'une entreprise familiale à une PME très structurée.
Si je me positionne comme lorientaise, j'éprouve une certaine fierté à avoir accompagné l'ancrage local et la naissance de Lorient La Base : nous étions la première entreprise déjà sur place, et la première aussi à croire en la réhabilitation du site. J'ai aimé m'exprimer sur le développement de Lorient-LaBase, sur le fait que le site et ses teams de course apportent beaucoup à Plastimo : c'est vrai que les coureurs ont besoin d'entreprises comme Plastimo (et la quarantaine d'autres) et que de notre côté, nous avons besoin de leur apport technique, du supplément d'inspiration que les coureurs de haut niveau peuvent apporter au développement de produits. Et avec leurs records et leurs exploits, ils mettent en lumière ce site et toutes les personnes qui y travaillent.
De façon plus récente et affective, il y a la reprise par Alliance Marine. Nous avons redémarré fin 2012 plus modestement, avec une équipe réduite qui n'a cessé de grandir. C'était la 1ère fois que le DG était plus jeune que moi et j'ai vraiment beaucoup aimé collaborer à ce renouveau. Je pense que nous avons démontré à Alliance Marine que le Groupe avait eu raison de croire en la marque Plastimo et en ses équipes.