Interview / Lancelin : "Les constructeurs de bateaux n'hésitent plus à investir dans le cordage"

Nicolas Lancelin évoque l'évolution et la situation du cordage en plaisance

Nicolas Lancelin, dirigeant de la Corderie Lancelin, partage avec les lecteurs de BoatIndustry sa vision de l'évolution du marché du bout et du cordage dans la plaisance, en terme économique, technique et écologique et revient sur les effets du Covid-19.

A la tête de la Corderie Lancelin, entreprise familiale mayennaise bien connue du nautisme, Nicolas Lancelin, répond aux questions de BoatIndustry sur la situation du marché du cordage dans la plaisance et ses évolutions à la fois technique, économique et écologique.

Pouvez-vous présenter en quelques chiffres la Corderie Lancelin et son implantation dans la plaisance ?

La société emploie aujourd'hui 35 personnes en France et 3 en Australie. Nous réaliserons cette année environ 5,5 M€ de chiffre d'affaires. La part de l'activité liée au nautisme est aujourd'hui de 70 à 80%. Nous avons pour objectif de nous diversifier pour que cela représente moins de 50% d'ici 3 ans.

Bobines de cordage Lancelin
Bobines de cordage Lancelin

Comment s'est passée la période de crise Covid depuis 2020 pour Lancelin ?

2020 s'est plutôt bien passé car nous n'avons pas arrêté de travailler. On s'est appliqué à s'occuper des équipes et à continuer à maintenir l'activité, même si les volumes étaient moindres. C'est plus compliqué en 2021, car l'activité a repris, mais personne n'a fait de prévisionnel. Il y a des problèmes d'approvisionnement : pas de pénurie, mais des délais élastiques. On fait face aux humeurs de certains clients, qui n'ont pas anticipé de prévisionnel, mais ne comprennent pas qu'il y ait des délais. L'Avant/Après de 2020 a vite été oublié ! Il y a une incompréhension générale étonnante. Pour les matières premières, nous avions fait du stock l'an dernier. Dans les années 1980, on achetait encore un peu en Europe de l'Est, mais aujourd'hui quasi tous les fils polyester viennent de Chine ou d'Inde. Nous dépendons de l'industrie textile. Ces 6 derniers mois, les prix ont été très tendus avec des hausses entre +10% et +25% sur nos matières premières, surtout liées au transport. Nous sommes en train de faire nos prévisionnels. On va peut-être faire une hausse modérée en Juillet en attendant de voir comment cela évolue, car il n'y a pas de prévision fiable après les vacances.

Quelles évolutions avez-vous constaté plus largement ces dernières années dans le cordage pour la plaisance ?

On est dans une industrie beaucoup critiquée, parfois injustement. Les fabricants essaient d'acheter du plus haut de gamme sur les bateaux. Il y a 20 ans, on ne mettait que du polyester. Aujourd'hui, de gros clients n'hésitent pas à investir dans le cordage. La crise de la Covid n'a pas fait que du mal. Les clients sont moins dans la logique du micro-gain, à compresser les budgets. Passer de 500€ de gréement courant à 1500€ pour du dyneema et de bouts plus haut de gamme, ce n'est pas énorme sur le prix du bateau. Une partie des chantiers revient aussi sur le Made In France. Nous allons beaucoup miser là-dessus.

Les matériaux des cordages ont évolué
Les matériaux des cordages ont évolué

En terme de matériaux et d'impact écologique, sur quoi travaillez-vous ?

Nous faisons des recherches. On travaille notamment avec un partenaire polynésien sur la réintroduction du cordage en fibre de coco polynésienne sur place. Aujourd'hui, quand ils en ont besoin, la fibre est importée. Le chanvre peut aussi avoir encore des utilisations.

En revanche, on a abandonné la cellulose de pomme de terre ou le PET, quand on sait que seulement 10% des bouteilles plastiques sont recyclées. On travaille surtout sur la diminution de notre impact en terme de déchets, que ce soit les bobines de bouts, les emballages. Il faut voir l'impact sur le long terme. Une drisse en polyester qui dure 20 ans est mieux qu'un bout bio-sourcé, sur-emballé et qui dure moins longtemps. Quand on livre un gréement courant à un chantier pour un bateau, notre objectif est d'être plutôt à 0 emballages que 20 plastiques séparés.

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