Interview / Hervé Gastinel : "Bénéteau doit construire les bateaux au plus près des clients"

Usine du groupe Bénéteau

Dans cette 2ème partie d'interview, Hervé Gastinel, Président du groupe Bénéteau, expose à BoatIndustry les principaux éléments de stratégie industrielle du groupe et revient sur le positionnement des marques de bateaux nouvellement acquises et créées, comme les voiliers Seascape et les catamarans Excess.

A l'occasion de sa conférence de rentrée, Hervé Gastinel, président du groupe Bénéteau, a offert un entretien exclusif à BoatIndustry. Dans cette 2e partie (voir la première partie de l'interview ici), il trace les grandes lignes des stratégies industrielles et des positionnements de marque du poids lourd du nautisme.

Vous avez acquis une usine importante en Pologne à travers le rachat de Delphia. Quelle est, à plus grande échelle, la stratégie du groupe Bénéteau pour la production de ses bateaux ?

Nous menons d'importants investissements industriels pour accroître la flexibilité de nos usines, en y produisant des modèles différents. Nous voulons aussi produire au plus près de nos clients, en calant le niveau de production sur celui des ventes. Avec l'acquisition de Delphia, nous nous renforçons sur le marché polonais, avec également une capacité de développement et de prototypage. Nous avons aussi réouvert une ancienne usine du groupe RBH à Cadillac, fermée depuis la crise de 2008. Cela ajoute une capacité de 1000 bateaux par an aux Etats-Unis. Même si le marché asiatique n'est pas encore mûr, il faut s'y préparer. Nous avons regroupé la partie commerciale à Hong-Kong et un site de production pourrait voir le jour dans un horizon de 2 ans. La priorité reste aujourd'hui l'Europe et les Etats-Unis.

Usine Delphia

Quel est l'avenir des marques nouvellement rachetées Seascape et Delphia?

La marque Sescape n'est pas une marque mondiale, mais communautaire. Beaucoup a été fait, notamment en France et en Allemagne pour fédérer et animer le réseau. Nous allons continuer à travailler en France avec François Coutant, le distributeur de Seascape. Nous sommes ravis d'intégrer une bonne équipe et un architecte, Sam Manuard, avec lequel nous n'avions jamais collaboré. Ensuite, c'est clairement dans First que se joue l'avenir de Seascape. (NDLR: les voiliers Seascape ont été rebaptisés First et redécorés depuis le rachat.) Du point de vue industriel, les bateaux sont sous-traités dans une large part et nous examinons s'il est plus opportun de réintégrer la production.

Concernant Delphia, il y a de nombreuses belles marques comme Bluescape, Escape ou Nano. Nous menons une investigation complète pour voir comment les intégrer dans notre gamme.

Comment va s'articuler la production des Lagoon, Excess et CNB? Où en est la production de one-off à Bordeaux ? Qu'en est-il du serpent de mer d'un déménagement en Méditerranée ?

Le lancement des catamarans Excess a pris du temps pour créer la gamme, mais aussi en raison des enjeux de production. Nous avons doublé la capacité de production l'an dernier, avec 800 multicoques entre Bordeaux et la Vendée. Les catamarans Excess n'auront pas de site de fabrication dédié.

Concernant un renforcement de CNB Lagoon vers la Méditerranée, il n'est pas exclus. Mais la problématique de transport ne nécessite pas cette implantation. En revanche, nous encourageons des initiatives comme l''agrandissement de notre fournisseur Sailing Atlantique Services à Canet en Roussillon.

L'activité de bateaux one-off CNB est aujourd'hui en sommeil. Il y a eu beaucoup d'activité, avec notamment le projet du 90 pieds CNB et la priorité reste les gammes Lagoon, CNB et Excess.

Mise à l'eau du premier Lagoon Seventy 8

Vous sortez de nombreux nouveaux modèles. Cette course à la nouveauté est-elle nécessaire ?

Je crois que oui. On a beaucoup reproché aux groupes de l'automobile d'avoir décliné à cause de cela. L'investissement est de 1,5 à 2M€ par nouveau modèle pour plusieurs centaines de bateaux. Ce ne sont pas des innovations gadgets. Seul un groupe avec la capacité industrielle, capable de synergies permettant de mutualiser les coûts de développement et disposant d'un réseau d'ampleur mondial peuvent tenir un tel taux de renouvellement sur plusieurs années. Le marché de l'occasion nous pousse à nous différencier.

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