Interview / Groupe Bénéteau : "Le boat club est une nouvelle entrée de gamme pour le nautisme"

Paul Blanc, responsable des boat clubs pour le groupe Bénéteau

Nommé à la tête des offres boat clubs de la branche Boating Solutions du groupe Bénéteau, Paul Blanc nous explique la stratégie du leader de la plaisance dans ce secteur des services et des boat clubs, les leçons qu'il tire des expériences passées auprès de Freedom Boat Club et du Bénéteau Boat Club, ainsi que ses ambitions, à travers notamment le rachat de Wiziboat.

Écoutez cet article

Après 3 ans à la tête de la marque Jeanneau, Paul Blanc a été nommé en charge des boat clubs dans la division Boating Solutions du groupe Bénéteau. Il répond à nos questions sur ce marché très discuté depuis de nombreuses années et la stratégie du groupe vendéen, qui a récemment racheté la start-up Wiziboat, actrice majeure du boat club en France.

Pouvez-vous nous rappeler ce qui constitue l'entité Boating Solutions du groupe Bénéteau ?

Il y a 4 branches au sein de Boating Solutions :

  • Le charter, où le groupe a un rôle plus capitalistique qu'opérationnel, à travers des investissements en co-entreprise avec le fonds tchèque PPF au sein de Dream Yacht Worldwide et Navigare.
  • Les boat-clubs sur le créneau d'usage des petits bateaux à moteur
  • Le financement à travers principalement de notre filiale SGB Finance avec la Société Générale
  • Le digital avec Band of Boats et notre application Sea n'Apps notamment

J'ai été chargé de me centrer sur les boat clubs, qui méritent que l'on y passe du temps pour bien le faire.

Bénéteau avait déjà lancé son boat club
Bénéteau avait déjà lancé son boat club

Pourquoi s'intéresser aux Boat-clubs ?

Le groupe a la volonté d'intervenir dans les services pour accompagner ses clients au-delà de l'achat des bateaux. Nous n'allons pas remplacer nos concessionnaires qui sont les experts qui connaissent le terrain. Mais cela fait longtemps que l'on recherche des activités contracycliques dans la plaisance, très soumise à la cyclicité. Aujourd'hui, nous avons plus à faire à des consommateurs qu'à des propriétaires de bateaux. Depuis 2019-2020, la transition des générations s'est accélérée. Nous avions des clients baby boomers et aujourd'hui plus de millenials et de génération Z.

De plus, dans la location, il n'y a pas aujourd'hui de marque bien structurée. Le client doit faire son marché dans une foule de petits acteurs. Notre objectif est de structurer cela pour trouver les clients qui veulent louer.

Le groupe Bénéteau a déjà tenté différentes expériences de boat clubs. Quels ont été les freins et pourquoi la nouvelle offre, avec le rachat de Wiziboat, devrait-elle mieux marcher ?

Il y a 2 offres dans le groupe : la première aux Etats-Unis, où l'on a racheté YourBoat Club, un boat club à l'américaine avec beaucoup de services, les T-shirts logotés et tout ce qui va avec, qui correspond au marché. En Europe, on a vu que la demande n'est pas la même. Le client recherche plus une location maligne que l'appartenance à un club. Le consommateur européen n'est pas prêt à débourser une grosse somme dès le départ comme on l'a vu avec Freedom Boat Club et le partenariat qu'il y a eu avec Jeanneau. La base pilote du Bénéteau Boat Club aux Sables d'Olonne, pour tester le concept, commence à prendre, avec 45 membres.

En parallèle de mon travail chez Jeannneau, en 2022, j'ai été chargé de remettre à plat la stratégie Boat Club du groupe. La question s'est posée d'avoir un Jeanneau Boat Club d'un côté et un Bénéteau Boat Club de l'autre, ou un service unique. Nous avons décidé de partir sur une marque unique en Europe. Wiziboat commençait à travailler avec certains concessionnaires Bénéteau, qui nous ont suggéré de nous y intéresser. Cela a abouti à un deal, avec la prise de 74 % des parts de Wiziboat.

Les difficultés rencontrées sont en partie liées au retard par rapport aux Etats-Unis, avec un âge moyen du plaisancier plus élevé. Par rapport à il y a 5 ans, il y a eu une accélération de la transition de génération. On est aussi plus exposé à l'économie d'usage en dehors du nautisme.

De plus, ce n'est pas le même métier de vendre des bateaux à 500 000 € et des abonnements à 500 €. Les concessionnaires ne sont pas les meilleurs pour vendre des abonnements. Avec des équipes marketing et vente dédiées, Wiziboat met l'abonné dans les mains du concessionnaire. Comme ils ont fait beaucoup de digitalisation, le bateau étant géolocalisé, il n'y a pas besoin d'un ponton avec des bateaux regroupés dans le port. Cela tourne en quasi autonomie, avec le concessionnaire en back-up qui n'a pas besoin d'embaucher du personnel en plus.

Wiziboat
Wiziboat

Quel est l'intérêt pour le concessionnaire ?

C'est un outil annexe pour développer son activité. Il n'y a pas de frais de franchises et il peut débuter avec des bateaux de son stock. Wiziboat prend une commission sur les abonnés, modulée selon qu'ils sont amenés par Wiziboat ou trouvés en direct.

Il y a un intérêt, pas temps pour les bénéfices de l'activité en tant que telle, mais parce qu'elle amène des gens dans le nautisme. Avant, on achetait un bateau de 5 mètres sur remorque, ce qui a un peu disparu, le boat club est la nouvelle entrée de gamme. Avec 5 bateaux sur une base, cela fait 50 à 100 personnes, parmi lesquelles il y en a forcément une ou deux qui voudront devenir propriétaires.

Quels sont le plan de développement et la base type ?

On veut se développer au sein du réseau de concessionnaires du groupe, avec un niveau d'offre homogène et de qualité, et toujours les mêmes types de bateaux, renouvelés tous les 2 à 3 ans. La force du réseau nous donne une densité qu'aucun autre n'a. Sur les 5 à 7 m open, on va pouvoir optimiser et standardiser des modèles. Si la majorité des bateaux devra provenir de la gamme rigide du groupe, on veut garder une architecture ouverte avec la possibilité par exemple de semi-rigides, comme c'est le cas en distribution, où nos concessionnaires ont des marques de niche complémentaires.

La 1ère année vise la consolidation en France en 2024, puis un déploiement en Europe, d'abord en Italie et en Espagne en 2025. En France, il y a probablement plus de potentiel dans le Nord, en Manche et Atlantique qu'en Méditerranée, car les clients sont là en permanence, et un peu moins fortunés. Il y a un marché dans les grandes villes sur l'eau, et dans des villes avec des personnes en mobilité. Un ingénieur nommé à Cherbourg pour 3 ans n'aura pas de place en marina avant son départ, alors qu'il peut naviguer avec Wiziboat.

Le curseur sera à régler du nombre d'abonnés par bateau. 6 abonnés par bateau conviennent bien au départ, et cela peut s'optimiser à 10 par la suite.

L'objectif fixé aujourd'hui est d'une centaine de bases et 5 000 membres d'ici 2028.

Plus d'articles sur le thème
Pour aller plus loin
Réagir à cet article
Ajouter un commentaire...