Interview / Bénéteau : "Notre plus grosse marge de développement est en Amérique du Nord"

Le Leader 12.5 WA est particulièrement pensé pour le marché américain

Dans ce 2ème volet de notre entretien, Jérôme de Metz, PDG du groupe Bénéteau, évoque les choix d'implantation industriels pour la production des bateaux, la cession des marques Monte Carlo Yachts, Glastron et Scarab, ainsi que la politique de ressources humaines du leader de la plaisance.

Jérôme de Metz, PDG du groupe Bénéteau répond aux questions de BoatIndustry sur la stratégie industrielle et de ressources humaines du poids-lourd de l'industrie nautique. Il évoque l'avancée de la recomposition du portefeuille de marques.

Après avoir fermé des usines en 2020, vous annoncez des investissements sur le site Jeanneau de Cholet. Pouvez-vous nous en dire plus sur vos choix d'outil industriel ?

Il faut avoir une approche chronologique. Nous avons d'abord eu besoin d'adapter notre capacité de production de gros bateaux, à l'arrivée de la crise économique suite à la crise sanitaire. A l'époque notre seul repère était la dernière grande crise de 2008. Nous avons fait le choix de nous préparer au pire, soit la même chose qu'en 2008. Sur les 19 usines de bateaux, nous avons fait un plan industriel pour déterminer combien d'usines fermer ou mettre en sommeil, à l'arrivée 2 ou 3. Certains sites n'avaient plus d'avenir car certains ne tournaient déjà pas à 100 %. A Marion, aux Etats-Unis, il aurait fallu beaucoup investir et le site était déjà en difficulté du fait du marché du monocoque en Amérique du Nord. Pour Seascape en Slovénie, qui n'emploie que 40 personnes, les managers ont repris la majorité et nous sommes passés en sous-traitance avec une gestion en mode start-up.

En parallèle, en avançant vers la saison, on a vu une forte demande de petits bateaux et une baisse moins importante qu'anticipée pour le reste. Le challenge est aujourd'hui d'avoir moins d'usines, plus saturées. Pour améliorer la productivité de nos usines, on investit en France et l'on est fier de le dire. Il n'a jamais été question de désinvestir en France. Nous avons investi 14 M€ l'an dernier pour l'extension à Saint-Gilles Croix de Vie. En modernisant le parc à Cholet (NDLR : 5 M€ de travaux d'ici octobre 2021 sur une usine de 290 salariés), on passe de 1 axe à 3 axes, avec plus de souplesse et un passage de 2 bateaux par jour à 2,5 bateaux par jour.

Ex-usine Bénéteau de Marion aux Etats-Unis
Ex-usine Bénéteau de Marion aux Etats-Unis

Qu'en est-il des lieux d'implantation par rapport à la logistique et au marché desservi ?

Il y a un recentrage en France, mais les bateaux de moins de 35 pieds restent toujours construits en Pologne. Le bassin d'emploi y est assez saturé. Nous ne sommes pas les seuls à y produire, nos concurrents aussi et un jour la Pologne sera probablement insuffisante. Nous réfléchissons à notre empreinte industrielle à 3 ou 4 ans. A part Cadillac (NDLR : dernière usine de Bénéteau en Amérique), nous sommes loin du marché nord américain. Nous restons compétitifs avec la production en Pologne, mais il y a une question logistique et de raisonnabilité écologique. Nous nous engageons avec le projet Neoline (NDLR : projet de cargo à la voile soutenu par Bénéteau), mais au-delà de cela, le sujet USA n'est pas traité. Il y a une grosse marge de développement à venir sur ce marché et c'est une actualité dans notre plans sur 5 ans, établi de manière roulante en fonction des 23 segments de marché que nous avons identifiés.

En Asie, il y a une évolution, mais pas de révolution. On ne voit pas de décollage rapide, en dehors des flottes de catamaran pour le tourisme local et international dès que les avions redécolleront. Il y a aussi les eaux intérieures, en fonction de la conscience environnementale des Chinois. La problématique de choix d'implantation industrielle est complexe. C'est très différent de l'Amérique, car il y a de nombreux pays avec des barrières protectionnistes.

Après la cession de CNB, comment avance le processus pour les autres marques que vous souhaitiez céder dans le plan Let's Go Beyond (Monte Carlo Yachts, Glastron et Scarab) ?

Il y a des discussions. Nous ne sommes pas pressés. L'activité est bonne et nous n'avons pas d'épée dans le dos. On n'a pas honte de les avoir !

Vedette Monte-Carlo Yachts
Vedette Monte-Carlo Yachts

Quelle est la situation en terme de recrutement, en terme de nouvelles embauches, d'alternance, mais aussi de mobilité des employés des usines fermées ?

Nous recrutons entre 200 et 500 personnes par an. Il y a environ 200 départs en retraite par an. Pendant la période Gastinel (NDLR : précédent dirigeant du groupe jusqu'en 2019), il y a eu 200 à 300 créations de poste, mais la croissance n'a pas été suffisante pour financer ces investissements. Nous avons recommencé à recruter. Il n'y a plus de chômage partiel. La majorité des mobilités internes suite à la fermeture des usines de Chalans et l'Herbaudière ont été acceptées. On a eu 2000 intérimaires, il n'y a pas si longtemps et l'on recommence à en recruter.

Concernant l'alternance, c'est une des grandes fiertés du groupe. Nous ne les avons jamais interrompu. C'est un devoir citoyen de former la jeunesse et nous sommes toujours contents d'embaucher les personnes que nous avons formées. Le taux de rétention est élevé.

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