Point de vue / Retour sur l'année 2018 : les chantiers de plaisance entre rachats et lancements de marque

Les voiliers Seascape sont passés dans le giron du groupe Bénéteau en 2018

L'année nautique 2018 a été riche en actualité. Entre concentration industrielle, diversification et lancement de nouvelles marques de bateaux, BoatIndustry revient sur les grandes tendances et les événements marquants de la vie des constructeurs de bateaux de plaisance.

Grands groupes nautiques : de l'ogre Bénéteau à la chute de Bavaria

La tendance générale de l'industrie nautique est à la reprise. Toutes les fédérations d'acteurs de la plaisance l'ont confirmé en cette fin d'année 2018, la filière a retrouvé des chiffres d'affaires comparables à 2008, avant la crise. Pourtant, ces montants ne doivent pas cacher que la taille des unités vendues augmentant, leur nombre a diminué. Cette évolution vers le haut de gamme a eu des conséquences sur le marché, mais semble devenue problématique.

Le groupe allemand Bavaria Yachtbau, qui a tenu en haleine l'industrie nautique mondiale pendant de longs mois, en est un exemple. Le constructeur bavarois de bateaux à voile et à moteur, a tourné au ralenti pendant de longs mois entre avril et septembre 2018, sous administration. Finalement racheté par un fonds d'investissement, il abandonne en 2019 la production de son plus gros voilier et de ses bateaux hybrides trop complexes pour se concentrer sur un nombre restreint de modèles.

Usine Bavaria

A l'autre bout du spectre, le groupe Bénéteau affiche sa volonté de toujours plus diversifier son offre et de continuer à multiplier les nouveaux modèles. L'année à été marquée pour le leader vendéen du nautisme par le rachat des voiliers slovènes Seascape et du groupe polonais Delphia. Bénéteau peut ainsi relancer la gamme First en disposant rapidement de petits voiliers modernes et acquiert de précieuses capacités de production en Pologne. Ces bonnes nouvelles ne doivent pas cacher quelques difficultés, comme celles de la filiale italienne Monte Carlo Yachts, spécialisées dans les grandes unités, et le départ de sa fondatrice Carla Demaria, ou celles de ses concessionnaires, à l'image du plus gros d'entre eux, Chemins d'Océans.

Voilier Delphia

Entre les deux, le groupe américain Brunswick affiche une stratégie de recentrage. Plusieurs réorganisations ont permis de séparer plus clairement l'activité nautique du reste des ses marques liées au fitness. Le fait le plus marquant pour Brunswick en 2018 a été l'échec de la vente de la marque SeaRay, dont le leader américain voulait se séparer. Il a finalement décidé de stopper la production des grandes unités, là encore problématiques. Le groupe s'est également séparé de la marque de niche scandinave Bella Boats.

Bateau à moteur hors-bord Sea Ray

Les chantiers navals de taille intermédiaire entre intégration et diversification

Du multicoque au monocoque, de la voile au moteur, du semi-rigide au paddle... l'heure est à la diversification. Premier exemple marquant, le rachat des voiliers Dufour par leurs voisins des catamarans Fountaine-Pajot est aussi le fruit d'une synergie locale. Le groupe Experton, propriétaire des voiliers haut de gamme et de tradition Wauquiez et Tofinou profite également de proximité rochelaise pour s'ouvrir au moteur avec le rachat du chantier Rhéa. Le chantier italien Del Pardo, constructeur des voiliers Grand Soleil, va lui aussi pouvoir poursuivre sa diversification dans les bateaux à moteur après l'arrêt du procès intenté par le groupe Hanse contre le Pardo 43. Le rachat de l'entreprise par ses dirigeants conforte la stratégie.

Rhéa 750

Plus éloignés de la pure construction navale, des intégrations verticales se nouent avec les motoristes et les équipementiers. Zodiac Nautic pourra désormais proposer ses propres paddles en complément de ses semi-rigides grâce à l'acquisition d'Anonym SUP. Le groupe BRP, poids-lourd du moteur hors-bord à travers Evinrude, s'offre aussi des débouchés avec le petit chantier Alumacraft.

Multicoque, encore et encore !

Quitte à se répéter d'année en année, le multicoque est encore et toujours l'un des secteurs les plus dynamiques.

Si l'expérience des catamarans Dufour risque d'y trouver son point d'arrêt, le rachat par Fountaine-Pajot est une preuve de plus de la santé du secteur des multicoques. Le groupe Grand Large Yachting avance dans l'intégration de la marque américaine Gunboat, rapatriée en France et pousse l'Explocat de son chantier Garcia. Suite aux difficultés de Bavaria, le chantier Nautitech devrait retrouver plus d'autonomie. Le TS3, petit frère du TS 42 de Christophe Barreau, s'est trouvé un nouveau constructeur, Mestral Marine Works en Espagne. On a également vu arriver des constructeurs étrangers sur les catamarans haut de gamme, à l'image d'Ita Catamarans ou McConaghy.

Premier Gunboat en construction en France

De nouvelles marques de catamarans ont aussi été annoncées en France en 2019. La plus attendue est probablement Excess, lancée par le groupe Bénéteau avec des ambitions et un bruit marketing à la hauteur de sa puissance, mais on peut également citer Windelo, lancé par Olivier Kauffmann d'Orange Marine.

Catamaran Windelo

Sur trois coques, Neel Trimarans poursuit une forte croissance, comme le prouve le rachat de TechniYacht Pinta pour assurer ses capacités de production.

La profusion d'offre de multicoque tend désormais à combler les niches laissées entre les catamarans de grande série et le très haut de gamme.

Transmission chez les artisans du nautisme

Passées les têtes d'affiche, l'industrie nautique est portée par de nombreux chantiers locaux, nés de la passion de leurs fondateurs. Passage de témoins et rapprochement avec des entrepreneurs d'expérience sont souvent le moyen de maintenir l'équilibre et le dynamisme de ces structures. On a ainsi vu en 2018 la reprise de Marine Composite, le fabricant du Bihan 6.50, de Pro Marine, d'Espace Vag, constructeur des cat-boats Ikone. FunYak et Rigiflex ont associé leurs forces. La transmission n'exclut pas une certaine continuité, à l'image de Marsaudon Composites, dont le fondateur Sam Marsaudon reste dans l'entreprise avec les nouveaux propriétaires ou la nouvelle Pabouk Compagnie qui reprend les modèles arrêtés de la gamme Pabouk en partenariat avec le fondateur Antoine Carmichaël.

Du plus gros au plus petit, tous les constructeurs de bateaux de plaisance ont dû se mettre en ordre de marche pour faire face à la reprise du marché. La consolidation a marqué l'année 2018, tout en laissant heureusement la place à la naissance de nouveaux projets, notamment vers des bateaux plus petits. Comment répondront-ils à l'évolution du marché et aux nouveaux usages esquissés par l'évolution des services en 2018 ? Des éléments de réponse en 2019 !

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